SOURCES RUN IN LIVE 7-3-2011
Marche athlétique Yohann Diniz : Opération record du monde en danger à Reims
Samedi 8h30, sur la piste du stade Georges Hébert à Reims, le Champenois Yohann Diniz de retour d’un stage aux USA va s’attaquer au record du monde du 50000 mètres, détenu depuis 1996 par Thierry Toutain, qui avait réalisé 3h40’57’’9. Double champion d’Europe, vice champion du monde, Yohann, titulaire d’une marque de 3h38’45 sur 50 km et de 1h18’58’’ sur 20 km semble en mesure d’effacer son compatriote des tablettes.
Une sacrée année se présente pour le marcheur français. Avec les Mondiaux de Daegu prévu en septembre 2011, plus les JO déjà en ligne de mire, il lui importait au titre d’une épreuve de réglage de prendre part à un 50 km en mars. A dessein, a été montée l’opération : « Record du monde en danger » Un challenge qui ne se limitera pas uniquement à la recherche d’une performance sportive, mais qui lui permettra également de « Communier » avec ses proches, son club, la ville de Reims et le public toujours prompt à le soutenir. Rencontre en avant première.
. Avant ce stage aux Etats-Unis, quel type de préparation as-tu suivi ?
- J’ai repris en octobre. Jusqu’à Albuquerque l’accent a été mis sur le foncier. Petit à petit, je suis monté jusqu’à 170 km par semaine, voire 200.
. Combien de semaines a duré ce stage à Albuquerque (Nouveau-Mexique) ?
- Il a duré 3 bonnes semaines du 04 au 25 février
. Pourquoi cette destination alors que tu avais manifesté l’envie de privilégier des lieux de stages proches de chez toi ?
- Au départ, il y avait l’envie de tester un nouveau lieu de stage, afin de constater comment je réagis au décalage horaire et la redescente en altitude. Pas dans le sens Est-Ouest, mais au retour 15 jours avant cette tentative sur piste, car à l’occasion des mondiaux de Daegu, je devrai également m’adapter à un jet lag de 9 heures en me déplaçant vers l’orient. En fait, je voulais me mettre dans une configuration semblable à celle de la Corée.
. Au plan de l’entraînement en quoi a consisté ce stage ?
- Toutes les semaines, j’ai marché 200 km. On a continué à travailler le foncier, mais en incluant de l’intensité dans l’optique de ce 50 km. Les sorties pouvaient atteindre 40 km et elles comportaient des phases d’allure plus rapides que la moyenne de 4’24’’ au km qu’il faudra respecter pour battre ce record. Par exemple, je débutais les 20 premiers km à 4’30’’, avant d’enchaîner 10 km à 4’25’’ et de finir les 10 derniers entre 4’15’’ et 4’20’’.
. As-tu apprécié Albuquerque ?
- Oui, même si au début du stage, il faisait très froid. Pour s’entraîner c’est agréable. Le long du Rio Grande, il y a de longues pistes cyclables. Ce qui évite de se soucier des véhicules. Et les salles de fitness sont top. Ca m’a permis de continuer à bosser la musculation. En plus, on était au calme, dans un endroit retiré. Bref, il y avait de quoi bien se préparer.
. Excepté Pascal Chirat, ton coach, des sparing-partners t’accompagnaient-t-ils ?
- Non. Cédric Houssaye qui prépare les 50 km de Dudince s’entraînait également à Albuquerque, mais dans un autre lieu et nous ne nous sommes pas vu beaucoup. La ville est vaste.
. Pour t’imprégner des 125 tours qui t’attendent, as-tu beaucoup marché sur piste ?
- Pas du tout. C’était prévu, mais la piste n’était pas au top, alors on s’est trouvé une petite boucle. Mais, j’ai déjà effectué un 50 km sur piste. C’était en 2004 dans le 93 après les JO d’Athènes et j’avais réalisé 3h52’11’’. Ca m’avait plu, mais j’avais galéré dans les 10 derniers km. Aussi, je n’avais pas autant d’expérience, ni le même niveau qu’aujourd’hui et je ne peux pas m’en servir, comme référence. Toutefois, puisque j’en ai déjà fini un, je peux bien en accomplir un 2e. Il suffit de rentrer dans sa bulle et de se dire que l’on va tourner en rond et accumuler 125 tours. Lors des grands championnats, nous évoluons sur de petits circuits. Aux Europe de Barcelone, la boucle mesurait 1 km. En fait, ça va même passer vite entre les spectateurs présents, plus les points de repères sur lesquels je vais me concentrer. Le 50 km a été découpé en 4 phases et 3 lièvres vont m’assister. Un du départ au 5e km, l’autre du 5e au 20e km et le 3e du 20e au 35e km. Je finirai seul les 15 derniers km. Toute cette organisation implique du mouvement, des changements qui font que le 50 km est animé et que je n’aurai pas le temps de souffrir de la monotonie et de la lassitude.
. Peux-tu nous présenter ces pacers ?
- Du départ au 5e, Johan Augeron, un jeune lancera la course. Son but consistera ensuite à se tester sur 35 k. Le Tunisien Hatem Ghoula le relayera pour m’emmener jusqu’au 20e km. Lui, tient à aller jusqu’au 50e km. Aux mondiaux d’Osaka, il avait fini 3e du 20 km. Puis, le Polonais Grzegorz Sudol poursuivra du 20 au 35e. A Barcelone, il avait pris la seconde place et il possède un record de 3h42’24’’ sur 50 km. Après, je serai seul pour conclure.
. Mais comment comptes-tu procéder ? Vas-tu respecter le même rythme durant les 50 km, ou espères-tu réaliser un negativ split ?
- L’objectif reste de progresser sur une allure de 4’24’’ jusqu’au 40e km et d’accélérer ensuite et de tenir entre 4’15’’ et 4’20’’. Donc, dans cette hypothèse, il y aura forcément negativ split.
En 2009 à Dudince, j’avais bouclé les 10 derniers km en 4’10’’. Si je suis bien et frais, mentalement j’aurai envie de finir fort. Ca met en confiance. Mais tu peux également terminer chiffon et te battre pour terminer sur 4’24’’. Ca reste un 50 km avec toute la magie et les surprises que recèle cette longue distance.
. Quels avantages présentent la piste ?
- La piste permet d’être très régulier, puisque tu fonctionnes par tranche de 400 mètres. Lorsque j’en avais fait un, entre le premier et le second 20 km, il n’y avait qu’une seconde d’écart. Et contrairement à un circuit, il n’y a pas de demi-tour. Sur un anneau, on ne perd pas de temps dans les relances et le rétablissement des trajectoires.
. Que ressens-tu à l’idée de jouer à domicile ?
- Ce qui me fait plaisir avant tout, c’est d’offrir ce moment au public et que les médias n’évoquent pas uniquement la marche à l’occasion des grands championnats. Là, ça va revenir à communier avec mes proches sur Reims, le club, la ville et tous ceux qui n’ont pas la possibilité de me suivre sur les compétitions, excepté lors du meeting, où j’aligne un 5000 mètres. Là, ils assisteront à un 50 km. Si le public n’est pas trop nombreux, on tient à ce qu’il puisse être sur la pelouse, pour que cette fête soit plus intime. Bon, s’il y a trop de monde, il faudra bien ouvrir les tribunes. Après, normalement, j’ai ce record dans les jambes. Donc, j’y pense. Ca sera la cerise sur le gâteau.
. Et le record du monde sur route de l’Australien Nathan Deakes ?
- Ce record de 3h34’20’’, il faudra le battre à Londres. Aux JO il y aura tout le monde et là il importera de sortir la course de sa vie, parce que ça sera une course de costauds. Vu que les conditions climatiques n’auront rien à voir avec celles de la Corée, où le taux d’humidité approche les 90% et où il fait très chaud en été, ça ira très vite. Il faudra être à 100% de ses moyens, alors qu’à Daegu il s’agira d’une course d’hommes dans un environnement dantesque.
. Au fond à travers ce défi, n’y a-t-il pas la volonté d’impressionner tes adversaires que tu retrouveras à Daegu et à Londres ?
- Non. Ce n’est pas nécessaire. A Barcelone, je leur ai montré que je n’étais pas mort. Samedi, je ne vais pas obligatoirement sortir un énorme chrono, mais moins de 3h40’ ça montrera malgré tout que je suis là. Ca suffit. Je sais que nous sommes 3, 4 à pouvoir prétendre au titre mondial et à l’or olympique et rien ne sert de chercher à assoir une quelconque suprématie maintenant.
. Et après ce challenge rémois, quel programme ?
- Je vais couper complètement, comme après un grand championnat, pour bien récupérer. Pendant 15 jours, je ne chausserai pas les running. La 3e semaine, j’irai me régénérer en thalasso à Carnac, où là je reprendrai tranquillement la marche, avant d’envisager crescendo la préparation en vue de Daegu. Je participerai peut-être à la Coupe d’Europe sur le 20 km au Portugal, mais sans en faire un objectif et sans m’entraîner spécifiquement pour cette échéance. On ne va pas recommencer l’erreur de Metz, où j’avais fini carbonisé, parce que faute de récupération, j’avais eu du mal à digérer mes 3h38’ en Slovaquie. La Coupe d’Europe, je l’appréhenderai sur mes qualités naturelles de vitesse. Donc, il ne faudra pas s’attendre à ce que je sois bien placé. Toutefois, je peux contribuer à renforcer l’équipe. Avec des jeunes comme Moulinet et Campion, il y a moyen de viser un résultat par équipe et de vivre une belle aventure humaine. Pas de soucis.
. Quid des meetings IAAF ?
- Non. Je ne pense pas m’inscrire à ces meetings. Un 50 km au cours de la saison, ça change la stratégie. En 2010, d’une part je n’avais pas couru de 50 km avant les Europe, d’où ces meetings et d’autre part j’avais besoin de me confronter à mes adversaires pour retrouver le goût de la baston. Ce qui m’a servi à Barcelone. Désormais, psychologiquement ça va bien, même si au plan mental, afin de rester centré sur mon objectif, je continue à pratiquer la sophrologie. Donc, je préfère vivre une vraie phase de récupération, puisque j’aurai à assimiler ce 50 km. Ne pas faire un 50 km au cours de cette longue saison aurait été une erreur, parce que j’ai besoin d’une épreuve de réglage. Par contre, en 2012 mon seul 50 km sera celui des JO. Voilà pourquoi, l’année prochaine, je reviendrai sur les meetings IAAF de 20 km. Je les considérerai comme des séances. Que je finisse 3e, ou 5e à Cesto San Giovanni, tout le monde s’en fout. L’essentiel sera de se présenter en confiance à Londres, pour réussir.
. En fait avec Pascal Chirat, n’avez-vous pas commencé la préparation de Londres ?
- Oui. Nous avons couplé 2011 et 2012 en une année. 2011 va se finir tard. Les mondiaux de Daegu auront lieu en septembre. Vu les conditions dans lesquelles ce championnat va se disputer, nous allons y laisser des plumes. Comme il faudra bien récupérer et bien se régénérer en vue des JO, prévus en août 2012. Si j’entame la préparation olympique en novembre, ça ne laisse que 8,9 mois et l’échéance va vite être là.
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