Mon cher Mouliniakin, puisque t’insiste tellement et si Roger le permet, je vais te raconter sur ce forum, pour que d’autres jeunes comme toi puissent aussi rêver, un petit morceau de l’histoire d’un Oiseau de Légende qu’était Robert RINCHARD :
Cela ne s’invente pas, Robert RINCHARD était originaire de JAMBES en Belgique, mais la longueur de ses pas faisait plutôt penser qu’il était monté sur des échasses. Ses « trois glorieuses » sont entrées dans la légende de STRASBOURG-PARIS par leur côté épique au plein sens du terme, c'est-à-dire des actions héroïques propres à l’épopée.
Commençons par la dernière en 1976, canicule du siècle, où durant les cent derniers kilomètres il lui était impossible de s’arrêter, sous peine de ne plus pouvoir repartir, il avait les pieds brûlés au troisième degré par le bitume qui fondait au soleil.
Un après midi de cet été caniculaire, alors que j’étais assoupi à l’ombre de mon bureau de rédacteur au service des sports de la ville de Saint Denis, le téléphone retentit me faisant sursauter. Au bout du fil Robert RINCHARD qui s’inquiétait pour récupérer son lot de vainqueur de PARIS-STRASBOURG dans un magasin près de chez moi. Et c’est alors qu’il m’apprend qu’il venait juste de quitter son lit pour pouvoir remettre un pied à terre, UN MOIS !!! après avoir franchi la ligne d’arrivée, ce qui fut son dernier succès mémorable.
En 1975 il n’a pas gagné mais cette édition est entrée dans la légende par les images télévisées insoutenables de cet homme plié en deux, une bouteille d’eau coincée sous son aisselle pour faire contrepoids à un déséquilibre provoqué par une tendinite du grand dorsal. Le mal avait commencé à le tenailler vendredi matin vers NANCY, au 150ème kilomètre environ alors qu’il était en tête. Samedi après midi aux environs de CHALONS SUR MARNE 320ème kilomètre, toujours en tête mais talonné par Josy SIMON qui revenait à grands pas, il dut contraint par son entourage et l’équipe médicale s’arrêter longuement dans une grange, sous une nuée de caméras qui filmaient la scène dans toute sa cruauté.
Refusant obstinément d’abandonner alors que toute chance de succès s’était envolée, son mentor Louis GODART fils, autre figure de légende des STRASBOURG-PARIS d’après guerre, n’eut d’autre remède pour lui permettre de repartir de lui fixer cette bouteille d’eau sous son aisselle afin qu’il puisse retrouver un semblant d’équilibre et marcher, marcher..
Tant et si bien que ces images d’un surhomme complètement dégingandé, marchant cahin-caha dans la nuit aux lumières des phares de voitures étaient complètement irréelles .Il était comme un spectre déambulant au milieu d’une foule considérable dans la traversée des villages.
Cette longue agonie d’un marcheur aux abois a duré jusqu’à CHATEAU THIERRY 400ème kilomètre, et au petit matin du dimanche dans cette salle des fêtes désaffectée, toujours en 10ème position il a fallu toute la persuasion de l’équipe médicale pour le faire arrêter. Robert était comme cela, forgé dans le granit, il n’acceptait pas de renoncer tant qu’une lueur d’énergie lui permettait d’avancer, d’avancer, …
Cette histoire pourrait faire sourire certain puriste du sport qui ne jure que par chronos ou titres. A ceux là je leur dit tout simplement que le temps est assassin et finit inexorablement par jeter aux oubliettes de l’histoire tous les chiffres et palmarès. Il ne reste au fond que ces « faits d’arme » qui marquent à jamais l’imaginaire collectif, comme ce duel au sommet entre deux monstres sacrés du TOUR DE FRANCE, POULIDOR et ANQUETIL dans la montée du PUY de DOME.
Ce qu’a fait Robert RINCHARD on pensait que seule une bête pouvait le faire … et on avait pas tout à fait tort…
C’était la veille de sa deuxième victoire en 1974, et Robert approchait de CHATEAU THIERRY entouré de deux jeunes supporters, Denis DUGAST et moi, nous marchions à bonne allure. Robert RINCHARD était sur le point de boucler son deuxième 200 kilomètres d’affilée en moins de 24heures et à une question anodine de deux novices impressionnés par son allure d’ échassier à l’entrée de sa troisième nuit de marche, « ça va ? », il nous répond « Oh oui ! je vole !!!! »
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Ce matin je venais de quitter Jean Pierre GRANGE au téléphone et juste en sortant de ma maison pour partir m’entraîner, j’ai recueilli un petit oiseau qui venait de tomber de son nid. J’ai essayé de le ranimer en lui donnant des miettes de pain et un peu d’eau, mais le destin en avait voulu autrement j’étais arrivé trop tard !
Amis marcheurs ne perdez pas un instant et soyez tous derrière Jean Pierre GRANGE qui veut sauver STRASBOURG-PARIS.
Et qui sait, dans quelques années peut être vos exploits seront entrés dans la légende, celle qui donne du rêve à vos enfants….
